Il est nécessaire de distinguer les individus les uns des autres dans une société. L’identification des individus peut se faire par tout moyen mais le mariage, le décès, la reconnaissance et la naissance se prouvent par des actes d’état civil.
Ces actes s’établissent selon des critères bien définis par la loi. Le chapitre V du code civil dispose les règles générales en la matière. Les déclarations de naissance sont faites à l’Officier de l’état civil dans les trois jours de l’accouchement pour les enfants nés dans les communes et chefs-lieux de district et, dans les autres, dans le délai d’un mois.
Un acte de naissance est, un acte juridique de l'état civil. C'est un acte authentique, signé par un officier d'état civil. Il atteste de la naissance d'une personne, c’est également un élément de preuve de l’identité d’un individu. C’est à ce titre, qu’une copie de cet acte est souvent nécessaire lors de certaines démarches administratives, telles que le mariage civil, l'établissement du passeport ou de la carte nationale d’identité et l’inscription à un examen ou un concours.
Au regard de tout ce qui précède nous pouvons valablement nous poser la question de savoir quels sont les mentions obligatoires qu’un acte de naissance doit contenir avant de s’interroger sur la place de la coutume parmi ces mentions.
I- QUE DIT LA LOI à propos des mentions obligatoires de l’acte de naissance et pourquoi ces mentions ?
A- Les mentions obligatoires que doit contenir un acte de naissance ?
L’Article 167 du Code civil l’acte de naissance énonce : « (…) la date, le lieu et si possible, l’heure de la naissance, le sexe, les prénoms et noms de l’enfant. Les prénoms, noms, âges, lieux de naissance, professions et domicile des père et mère et, s’il y a lieu, les noms, prénoms, professions et domicile du déclarant ».
Mieux, l’Article 154 du Code civil dispose que « les actes de l’état civil doivent être écrits lisiblement et avec une encre indélébile ; ils énoncent l’année, le jour, le lieu et si possible l’heure où ils seront reçus ; les prénoms, noms, professions, domiciles et, si possible, les dates et lieux de naissance de tous ceux qui y sont dénommés ».
B- Le bienfondé de ces mentions.
A la lecture de l’ensemble des dispositions précitées, il convient de retenir que le législateur gabonais a voulu en tirer deux raisons :
- Elles permettent d’identifier et localiser la personne physique ;
- Elles permettent aussi de rattacher la personne physique à une famille, à l’Etat gabonais et à un groupe sociolinguistique.
En gros l’ensemble de ces mentions permet d’individualiser les gabonais.
II- QUE DIT LA LOI à propos de la mention de la coutume dans les actes de naissance ?
A- La loi ne retient pas la mention de la coutume.
A la lecture de l’ensemble des dispositions relatives à l’établissement des actes d’état civil et de l’acte de naissance en particulier, il n’est nullement retenu la mention de la coutume. Il se trouve que cette mention s’est faite en violation des dispositions précisées ci-dessus.
Dès cet instant, on est en droit de se poser la question de savoir si cette mention relève d’une erreur ou d’une intention malicieuse de distinguer autrement les gabonais en dehors des éléments de distinction prévus par la loi ?
B- Les conséquences tirées de la mention de la coutume dans les actes de naissance.
L’illégalité de la mention de la coutume dans les actes de naissance au Gabon peut avoir au moins deux effets :
En droit la mention de la coutume dans les actes de naissance peut avoir au moins deux effets :
- l’illégalité des actes de naissance comportant cette mention ;
- le retrait de la mention des actes de naissance.
Les actes de naissance, sont des actes administratifs, ils sont pris conformément aux dispositions que la loi prévoit. Lorsqu’ils y dérogent, ils sont frappés d’illégalité et encourent le retrait.
Sur le plan politique la mention de la coutume pourrait satisfaire une ambition électoraliste mais l’absence des instituts de sondages et la culture de la statistique vident cette possibilité de tout son sens.
Cette mention semble avoir pour objectif une discrimination qui consacre l’hégémonie de certaines ethnies sur les autres.
III- La mention de la coutume dans les actes de naissance : opportunité et inopportunité ?
Il s’agit d’examiner si cette mention a des raisons d’exister. Si oui pour quel avantage, si non pour quel inconvénient ?
A- Inopportunité sur le plan juridique
Sur le plan juridique, la mention de la coutume qui est déjà anticonstitutionnelle parce que le peuple gabonais est un et indivisible est au surplus inopportune et contraire à la lettre et à l’esprit des dispositions de l’article 155 qui indique clairement que « L’Officier de l’état civil ne doit relater que les indications prescrites par la loi ». Et au titre de celles-ci, il n’est nullement prescrit d’énoncer la coutume.
B- Inopportunité sur le plan socioculturel
La mention de la coutume ne parait pas utile même sur le plan socioculturel dans la mesure où elle semble avoir pour objectif de déterminer l’origine social ou ethnique des gabonais. Or, par la sociologie déjà ou par le patronyme chaque gabonais est rattaché à un groupe ethnique ou à une famille. Cet élément peut donc paraitre dès cet instant superfétatoire.
Après avoir constaté que cette mention est non seulement illégale et inopportune sur les plan juridique et socioculturel il serait peut être intéressant d’aller chercher les raisons qui peuvent la justifier sur la plan politique.
C- Le probable intérêt politique
Sur le plan politique, la mention de la coutume sur les actes de naissance a un intérêt infiniment petit.
Car nous pouvons envisager quelques hypothèses pour chercher à comprendre le bienfondé de cette mention.
En soupçonnant l’administration de chercher à connaitre le groupe ethnique le plus important de la nation et peut être de l’administration. La mention de la coutume pourrait se justifier. Même dans cette hypothèse, le patronyme et l’origine sociale paraissent suffisant pour atteindre cet objectif ;
En considérant qu’avec la mention de la coutume l’administration parviendrait à identifier tous les groupes ethniques du Gabon, cette mention se justifiera. Mais à l’étude des contours de cet objectif, on peut s’apercevoir qu’une étude sociologique ou linguistique aurait suffit à elle seule pour y parvenir. Donc, la mention de la coutume ne parait pas nécessaire.
Harold LECKAT, Sarah OGNYANE
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